Tsubaki Sanjûrô (Sanjuro)
Fort de la popularité et du succès commercial de Yojimbo, Sanjuro parait dès l’année suivante, mais ne rencontrera malheureusement pas le même succès. Mifune y reprend son rôle de ronin (samurai sans maître), dans un film somme toute beaucoup plus léger et accessible que le précédent. Le divertissement est au centre du projet, et le film atteint clairement ses objectifs. Toutefois, un peu comme pour Yojimbo, c’est un film qui m’a laissé sur ma faim, bien que les péripéties, cette fois, soient au rendez-vous.
Un groupe de neuf jeunes samurai croient que le seigneur Mutsuta (Yûnosuke Itô) est corrompu après qu’il se soit opposé à une pétition pour fraude le concernant. L’un d’entre eux informe le superintendant Kikui (Masao Shimizu) de la situation, et ce dernier accepte d’intervenir. Toutefois, Sanjuro, qui entend par hasard la discussion, met en garde le groupe contre le superintendant. Ne les croyant pas au départ, le groupe doit se rendre à l’évidence lorsqu’ils sont pris en souricière par Kikui, qui tente de les exterminer. Sanjuro leur vient en aide, et décide d’assister le groupe pour blanchir la réputation de Mutsuta.
Le nouvel environnement dans lequel Sanjuro est placé est beaucoup plus léger et invitant que dans le premier film, bien que les antagonistes soient tout aussi malicieux. Les hommages aux westerns américains se font toujours sentir, bien qu’ici on n’y retrouve pas le même décor désertique. L’histoire est à mon avis un peu plus développée que pour Yojimbo, mais elle ne bénéficie pas de l’originalité de ce dernier, malheureusement. Il y a néanmoins de belles scènes, notamment celle où Sanjuro infiltre le repère de Kikui. Kurosawa est devenu maître dans l’art de bien composer un plan, et il démontre l’étendu de ses talents une fois de plus ici.
La comédie occupe définitivement une plus grande place dans ce film, et si certains aimeront cette nouvelle direction, d’autres seront possiblement déçus de ne pas retrouver le sérieux du premier opus. J’aurais personnellement préféré une histoire moins comique, car je trouve que le personnage de Sanjuro ne s’y prête pas aussi bien que d’autres (Zatoichi vient rapidement en tête). Toutefois, il y a à mon avis moins d’éléments à tirer de Sanjuro, qui veut faire passer le divertissement à l’avant-plan.
J’avoue que le programme double Yojimbo/Sanjuro m’a considérablement laissé sur ma faim. Les deux présentent des qualités indéniables – excellente photographie, interprétation hors pairs de Mifune, hommage aux westerns – mais ils sont un peu trop superficiels pour m’avoir gardé investi suffisamment. Malgré leur courte durée, je les ai tous deux trouvés long. Peut-être qu’à la réécoute, je serai davantage indulgent, mais je préfère de loin les films plus sérieux de Kurosawa, à commencer par Rashomon et High and Low. Pour un réalisateur moyen, Yojimbo et Sanjuro pourraient être la culmination de leur carrière, mais pour Kurosawa, il s’agit de films relativement oubliables dans une filmographie plus qu’impressionnante.x
Fait partie de la Collection Criterion (#53).